5.Le camp de l'Epine

Voyant que Gawyn avait manqué son tir, Thom prit le relais. Le barde ne rata pas, cette fois non plus, et sa flèche vint se planter dans la nuque du fuyard. 

Ayant fini de calmer son cheval, Blake vint alors porter assistance à Weiss qui ferraillait avec le dernier bandit encore valide. Elle sauta de selle et dégaina une hachette. Pendant ce temps, l'équidé hennit et partit sans demander son reste, il n'était pas fait pour être une monture de guerre.

Lorsque le brigand vit Blake approcher de lui, il décida de lui régler son compte. La magus était plus difficile à toucher avec son fichu bouclier magique, pensa-t-il. Mais Blake n'avait pas besoin de bouclier pour esquiver un coup d'épée maladroit.

Sneeg étant toujours enchevetré - et incapable de viser correctement - Urin décida de se focaliser sur le dernier bandit pour soutenir les deux jeunes femmes.  Il invoqua une énorme boule de glace mais le sortilège devint incontrolable et le projectile gelé vint s'écraser dans les fourrés, à dix bon mètres de sa cible.

- Je vois que je ne suis pas le seul à ne pas savoir viser, fit remarquer Gawyn. Le nain le fusilla du regard :


- C'est difficile de tirer en pleine mêlée, jeune imbécile. J'avais peur de toucher la petite Blake ou la jeune Weiss.

Mais l'échec du nain n'eut pas de conséquence : Weiss avait réussi à neutraliser le bandit avec sa rapière. Le coup n'avait pas été mortel, mais l'ennemi était tombé inconscient.

Tous les regards se portèrent alors sur Sneeg, toujours piégé dans les ronces. Gawyn fut plus rapide que tout le monde et encocha une flèche.

- Je m'occupe de lui.


- Non ! Vous allez le tuer, espèce de crétin ! s'écria Weiss.

Trop tard, le paladin avait déjà tiré. Heureusement pour Sneeg, il rata encore une fois son tir.

Blake soupira de soulagement. Elle rangea sa hachette et sortit une flèche contondante de son carquois. Le projectile, muni d'une lourde tete ronde n'était pas létale, mais suffisait à assommer un solide gaillard pour plusieurs heures. Et comme Blake savait toujours aussi bien viser, la flèche frappa la tempe du brigand et l'expédia au royaume des songes.

- Heureusement que Blake a plus de jugeote que vous, grommela la jeune magus.

- Mort ou vif, quelle importance ? Garess va le tuer de ses propres mains de toute façon...

- J'ai vraiment du mal à croire que vous etes un paladin, mon cher Gawyn. Vous tuez tout ce qui bouge.

- J'ai fait le vœu d'anéantir tous les bandits, je vous le rappelle. Je ne suis pas là pour faire preuve de mansuétude à leur égard. 

- Très bien, c'est admirable. Mais c'est en agissant de manière aussi stupide que vous avez failli mourir hier, je vous le rappelle aussi.

Les deux jeunes nobles se toisèrent du regard et il fallaut l'intervention de Thom pour les calmer :

- Allons, vous n'allez tout de meme pas recommencer à vous disputer ?

- Allons plutot ligoter ces deux bandits avant qu'ils ne reviennent à eux... lacha Blake, excédée.

Une fois dépouillés de leurs armes et ligotés, les aventuriers procédèrent à l'interrogatoire des deux bandits.

Gawyn s'approcha de Falgrim Sneeg et dégaina son épée.

- Vous etes réveillés Messieurs ? Nous avons quelques questions à vous poser, si vous voulez bien, fit-il d'un air menaçant.

Spoiler:

Thom se pencha à l'oreille de Weiss et gloussa :

- Il fait des efforts, notre ami paladin.


Falgrim, la tempe encore ensanglantée, grogna :

- Qu'est-ce qu'on aurait à gagner à parler, puisqu'vous allez nous balancer au bout d'une corde tout'façon ?

Le barde intervint :

- Nous n'avons pas l'intention de vous faire pendre, il y a quelques amis à vous qui effectuent des travaux forcés au comptoir d'Oleg. Si vous voulez les rejoindre, il suffira d'etre coopératif.

Le bandit soupira.

- De tout' manière on est vos prisonniers. Si je peux échapper à la corde, j'veux bien tout balancer hein... Qu'est-ce vous voulez savoir au juste ?

- Qui est votre chef, ce mystérieux Seigneur Cerf et quelles sont ses intentions ? demanda Weiss en agitant l'un des médaillons en forme de cerf qu'ils avaient récupérés.

Sneeg secoua la tete.

- J'en sais rien, j'ai jamais vu son visage avec son fichu casque de cerf. Kressle aurait pu vous en dire plus, on raconte qu'elle couchait avec lui. 'Fin bref, tout ce que j'peux vous dire c'est que c'est un sacré ivrogne. Toute la bibine dans les caisses, c’est pour lui. Il a jamais les idées claires et il est tout l'temps bourré. Il est cinglé en plus, il a buté mon cheval pour avoir craché dans la cour,  j'vous jure que c'est vrai ! A vot' place je me frotterais pas à lui, un conseil qu'je vous donne, meme ivre mort c’est un sacré combattant.

- Il est si puissant que ça ? s'enquit Blake.

Le second bandit déglutit et répondit, l'air mal à l'aise :
- Puissant ? Mais c'est un monstre le type. Avec un arc dans les mains, il se bat comme le Vieux Borgne lui meme et je l’ai vu écrabouiller le crâne d’un prisonnier d’une seule main.

Blake et Weiss se regardèrent, mais Gawyn ne parut pas impressionné.

- C'est des racontars de brigands tout ça. Quand je lui aurais passé la lame de mon épée à travers le corps, nous verrons bien s'il est si effrayant que vous le prétendez.

Falgrim éclata de rire, un rire qui sonnait comme un grincement de casserole rouillée.
- Vous pouvez pas dire qu'je vous aurais pas prév'nu. A vous cinq vous feriez pas long feu au fort, y a des dizaines de bandits là bas, j'donne pas cher de vot' peau. Et puis vous savez mm pas où il est le Fort du Seigneur Cerf, il est bien caché.

- Mais vous allez nous le dire, n'est-ce-pas ? fit Weiss avec un sourire glacial.

Sneeg se mordit la lèvre, il ne voulait probablement pas en révéler autant.

- Parlez ! intima Gawyn.

- Oh, ça va, pas la peine de s'énerver. Le fort, y l'est au sud-ouest d'ici, caché dans la foret, dans un foutu marécage, près de la Moufette. S'il a pas changé, le mot de passe est : "Par les mamelles de Calistria, il va pleuvoir demain soir."

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- Un marécage ? Quel drôle d'endroit pour y placer un fort. , commenta la jeune magus. Mais je suppose que ça doit le rendre plus facile à défendre. Par contre, j'espère pour vous que vous nous avez dit la vérité.

Sneeg cracha par terre et sourit de tous ses dents
Juré, craché. Mais je vous rétorque la question, mademoiselle. Vous nous avez promis de ne pas nous livrer aux soldats, je vous le rappelle, hein ?

- Cette crapule ment, intervint Blake. De fait la tueuse avait remarqué le bref échange de regard entre le bandit et son comparse et avait senti que Sneeg essayait de les conduire sur une fausse piste.

- Comment, ils osent nous mentir ? fulmina Gawyn, en pointant sa lame sur la gorge de Sneeg.

- C'est votre dernière chance, Sneeg, fit Thom en fronçant les sourcils. Si vous ne nous dites pas la vérité, cette fois-ci, vois rentrerez au fort les pieds devant.

Le bandit patibulaire déglutit et finit par s'avouer vaincu.

- Bon, c'était juste une p'tite blague. Le fort est situé au sud-est, dans les Terres de Kame, au confluent entre la Moufette et l'Epine. C'est la vérité c'te fois, je le jure.

Blake se tourna vers son acolyte et l'interrogea du regard.

- Ouais Sneeg dit vrai, mad'moiselle. Et le vrai mot de passe c'est "Par les putains d’os de St Gilmorg, on s’en cogne !” Et non, je sais pas qui est ce St Gilmorg. Par contre, il a peut etre changé depuis le temps qu'on est plus retournés au fort.

Voilà qui est mieux. Vous avez intéret à vous tenir tranquilles jusqu'au comptoir et on avisera à propos de votre sort déclara Weiss.

Sur ces mots, le petit groupe hissa les bandits ligotés à l'arrière du chariot, sous la bonne surveillance de Gawyn et Urin, tandis que les deux jeunes femmes avaient repris la tete du convoi. Ils chevauchèrent à un rythme élevé et parvinrent à regagner le comptoir sans encombre à la tombée de la nuit, fourbus et harassés.

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